Une stratégie de reverse logistique volontariste est un pari | Christophe Leroy x RAJA

7 min lecture 27 novembre 2019

Comme tous les e-commerçants et retailers, vous avez déjà dû observer l’augmentation des retours de commande année après année. Il est donc temps de réfléchir à une politique retour robuste. Devez-vous prévoir d’aller encore plus loin dans votre stratégie “retour”? Christophe Leroy, directeur logistique & transport e-commerce, vous livre ses réflexions. 

Quels sont les éléments à prendre en compte pour définir une politique de retour financièrement maîtrisée ?

  • On parle ici de logistique colis de 0 à 30 kg. Pour les produits volumineux, c’est un peu différent.
  • J’exclue également les retours SAV qui sont également un cas particulier.

Portrait de Christophe Leroy, directeur logistique chez Motoblouz.

Qui dit ROI, dit d’abord coûts. Or, on ne peut parler de coûts sans d’abord avoir une réflexion sur l’expérience que l’on souhaite faire vivre aux clients. Les choix faits sur ce volet “expérience client”, impacteront le volet “coûts”.

Votre réflexion s’articule donc en 2 parties :
  1. Quels sont les coûts du retour de commande ?

1. Quelle praticité souhaitez-vous offrir au moment du retour ?

Pensez à réduire au maximum les contraintes possibles pour le client

A titre d’exemple, dans le cas de retours en points relais, lors d’un échange produit (ex : changement de taille produit), il peut être intéressant de synchroniser la livraison du produit de substitution et la récupération du produit à échanger (process swap, déjà utilisé chez les opérateurs téléphoniques).Ainsi, le client ne se déplace qu’une seule fois, et – même si cela peut prêter à sourire – il a toujours un produit en sa possession, donc il est naturellement plus rassuré !

Un autre exemple de démarche pour faciliter l’expérience client : proposer l’enlèvement du produit à échanger, au lieu de demander au client de le déposer en point relais.

Réfléchissez omni-canal et alignez vos process logistiques

Un cas classique, commande passée sur le web, retour client en magasin. En 2018, le client n’est pas du tout conscient (et il n’a pas à l’être !) des problématiques Systèmes d’Informations qu’une telle organisation peut poser (S.I. différents entre le web et le magasin, par exemple), donc il acceptera d’autant moins que cette commodité lui soit refusée !

Réduisez le délai transport retour perçu par le client

Dans le cas de retours “web”, les délais dans les réseaux transport traditionnels (relais, notamment), peuvent être assez longs (1 à 2 semaines, voire davantage). Une parade peut être le déclenchement de l’action souhaitée (produit de substitution, remboursement) dès la prise en charge du colis en point relais.

Votre business est-il adapté au Try then pay ?

[NdlR : paiement des articles “que l’on décide de garder, après l’essayage”]

A l’instar de ce que propose Zalando en France depuis quelques temps, ou encore ASOS au Royaume-Uni, et plus généralement la plupart des e-commerçants allemands depuis longtemps, le principe du “try on then pay” se développe. Cela lève un frein à l’achat pour le client ! Par contre, pour le e-commerçant, cela suppose une organisation bien rodée : expédition des produits sans paiement associé, en-cours de produits aller/retour non disponibles à la vente, taux de retours produits plus élevé, incidents de paiement post-livraison, etc.

Les coûts du transport retour à prendre en compte.

 

2. Les coûts à prendre en compte

Le coût du transport : il s’agit du coût du transport retour, puis du transport aller du produit de substitution, le cas échéant. Ce coût peut prendre des proportions énormes, particulièrement dans le cas de flux cross-border. Dans ce cas, il peut donc être avisé de trier et stocker les produits retours re-commercialisables en local, pour limiter les frais de réexpédition.

A cela il faut ajouter les pertes de colis lors du transport, plus fréquentes sur le flux retour que sur le flux aller.

Les coûts de traitement logistique du produit : tri, remise en conformité éventuelle (repacking, etc.), restockage

La perte éventuelle liée au déclassement en second choix voire à la destruction (décote partielle ou totale, circuit de re-commercialisation / destruction), dans le cas de produits retournés dans un état ne permettant pas leur revente en tant que produits neufs. [Lire nos conseils pour réduire les retours de commande]

Le coût du service client : particulièrement dans le cas où le client peut/doit téléphoner ou envoyer un mail pour solliciter un retour. [Note de la rédaction : d’où la nécessité d’automatiser au maximum la démarche]
Le coût des incidents de paiement : particulièrement dans le cas où le e-commerçant re-crédite le client sans avoir eu le produit en main auparavant ou dans le cas d’un process swap non piloté par le transporteur

Tous ces coûts peuvent être d’autant plus importants que le e-commerçant souhaite faciliter la vie du client ! (Voir mon premier point « praticité pour le client »)

“Le problème des retours – de surcroit lorsqu’il est offert – c’est le coût qu’il représente pour le E-commerçant : affranchissement, suivi client, vérification, traitement informatique.  Si certains frais sont difficilement compressibles, le E-commerçant peut faire la différence en s’organisant efficacement : anticiper et automatiser au maximum la gestion de ses retours. Par exemple, en mettant en place des systèmes de veille pour connaître chaque jour, quels seront les retours qui arriveront demain dans l’entrepôt et leur origine !”

Florian Cimetierre, co-fondateur d’ITinSell

 

Conclusion ?

Si l’on souhaite calculer un ROI sur le sujet “retour”, il est très difficile de mettre un gain en face. En effet, il est virtuellement impossible (sauf à avoir une audience énorme, et à faire de l’A/B testing poussé, par exemple) de pouvoir identifier clairement des gains, face aux coûts indiqués précédemment. 

Comment attribuer un comportement d’achat du client à une politique retour, alors que, dans le même temps, de très nombreuses variables changent en permanence sur les sites marchands (opération commerciale, largeur de gamme, délais de livraison, etc.) ?

En bref, une stratégie retour est un pari !

  • Pari que le client verra des freins à l’achat levés (d’où une amélioration du taux de conversion),
  • Pari que le client reviendra sur votre site car il a eu une expérience d’achat remarquable (d’où une amélioration du taux de repeat éventuelle).
  • A cela, nous pouvons ajouter des éventuels effets positifs en terme de notoriété, car les éventuelles innovations sur le sujet “retour” permettent aux e-commerçants de communiquer, en se différenciant de leurs confrères ! (Cf. les déclarations de Jonathan Trépo, DG France de Zalando, sur leur stratégie “retour”)

Ce pari mérite d’être “joué” ! Pour autant qu’il s’inscrive dans votre stratégie globale : acquisition, ré-assurance, notoriété, coûts

Eddy-RICHAUVET_ShopRunBack.pngLire aussi : les critères de performance d’une stratégie retour volontariste par Eddy Richauvet de ShopRunBack

 


A propos de l’auteur

Christophe-Leroy_motoblouz.pngChristophe Leroy a été le directeur logistique et transport de Motoblouz.com, leader français de l’équipement moto, scooter sur Internet (environ 400.000 unités d’expédition en 2017). Il vient de de rejoindre le cabinet conseil logistique Suppleo.

 

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